Auto Expo 2025

Interview Abdelouahab Ennaciri, Président de l’AIVAM


Interview Abdelouahab Ennaciri, Président de l’AIVAM

A l’occasion de l’Auto Expo, le salon du véhicule hybride et électrique, organisé jusqu’au 28 septembre à Casablanca, Abdelouahab Ennaciri, Président de l’AIVAM, décortique le marché des motorisations électrifiées au Maroc.


DRIVE IN : Dans un premier lieu, que pouvez-vous nous dire sur la situation du marché automobile national durant cette année 2025 ?

Abdelouahab Ennaciri : De manière générale et jusqu’à fin août dernier, le marché national se porte très bien, avec une progression de 30%. Nous avons un marché qui maintient sa performance mois après mois. En effet, le marché progresse chaque mois de manière très significative par rapport au même mois de l’année précédente (entre 30 et 35 %). A fin août dernier, le marché a enregistré une hausse de 30%. Une performance à laquelle personne ne s’y attendait, mais qu’on espérait tous. Mais il est à noter qu’on pressentait quand même une telle performance et que le marché devait rebondir et tirer profit de cette dynamique constatée au niveau économique, en particulier au niveau du secteur touristique. On s’en félicite.

 

Justement, quelle explication donnez-vous à ce trend haussier du secteur ?

Je pense que trois points expliquent cette situation.

La première est en rapport avec le cycle évolutif du marché durant ces trois dernières années, surtout depuis 2021-22 où nous avons constaté un marché qui stagne et qui recule. Un marché qui n’a pas en effet réussi à tirer profit de la progression mondiale. Ceci-étant, il fallait s’attendre à un rattrapage de ces trois dernières années. Donc on estime que 2025 est une année de rattrapage. Quand on regarde aussi le taux d’équipement en automobile ailleurs comme l’Europe ou la Turquie où il avoisine les 300 ou 400 unités par 1.000 habitants, on s’aperçoit que le taux de motorisation au Maroc, soit 110 véhicules/1.000 habitants, reste très faible. C’est dire que le besoin en mobilité dans notre pays est omniprésent.

Le deuxième facteur qui explique cette hausse n’est autre que cette performance à deux chiffres, enregistrée dans le tourisme ces deux dernières années, ce qui n’a pas manqué d’impacter positivement le marché de la location de voitures.

La troisième explication, on la trouve dans cette dynamique économique nationale caractérisée ces dernières années par le lancement d’une série de chantiers, de projets et de réformes structurelles. Cette dynamique continue d’avoir un impact positif sur le marché des véhicules neufs, en particulier les utilitaires.

 

Pensez-vous qu’à ce rythme, le marché marocain des véhicules neufs terminera l’année en dépassant la barre des 200.000 unités commercialisées ?

A ce jour, on est déjà à 70%. Et à ce rythme, je pense qu’on peut dépasser les 200.000 livraisons. Je pense qu’on va terminer l’année autour des 210.000 ou 220.000 unités écoulées.

 

Qu’en est-il aujourd’hui du marché des véhicules électriques et hybrides au Maroc ?

Si on revient un peu en arrière, le marché marocain a été dominé par le diesel, soit plus de 90% de son parc automobile. Cette tendance est aujourd’hui en train de s’inverser. D’abord, il y a un bon nombre de constructeurs mondiaux qui ont abandonné ou sur le point d’arrêter leurs machines à fabriquer des motorisations diesel. En Europe, comme la France par exemple, le diesel ne domine plus et ne dépasse guère la moitié du marché. Chez nous au Maroc, c’est une tendance qui a pris place depuis plus de deux ans déjà et qui est entrain de percer. La motorisation diesel, qui était à plus de 90%, représente aujourd’hui 75%, et cette transformation ne compte pas s’arrêter là et elle va continuer. L’essence est en train de prendre. C’est surtout l’hybride et l’hybride rechargeable, et tout un petit peu l’électrique, qui se développent, prenant ainsi le relais.

 

L’hybride a été quand même une idée pour switcher vers le full électrique ?

Exactement. Au début, on croyait qu’on pouvait switcher très rapidement vers le 100% électrique. Mais je pense qu’aujourd’hui, on n’est pas dans cette situation de transition. Loin de là, car l’hybride va s’installer pour une bonne durée. Et à ce niveau, les constructeurs sont en train de revenir sur leurs prévisions pour des approches plus raisonnables. Certes, l’électrique va arriver, mais beaucoup moins rapidement que ce qui a été prévu. Actuellement, la solution qui se veut plus judicieuse reste l’hybride et l’hybride rechargeable.

 

Selon vous, qu’est-ce qu’il faut maintenant pour promouvoir et développer les motorisations électrique et hybride au Maroc ?

Je pense qu’aujourd’hui, il faut absolument développer le réseau des bornes de recharge qui accuse un grand retard chez nous au Maroc. Là effectivement, les pouvoirs publics peuvent infléchir cette tendance et agir pour que le réseau des bornes de recharge soit plus dense, disponible et plus accessible. C’est encore très important pour les voitures électriques, car si on n’a pas un réseau de recharge, on ne peut se déplacer librement. Ce qui existe aujourd’hui est largement insuffisant par rapport à ce qui se fait dans d’autres pays soucieux de développer la mobilité propre. Il faut aussi une parité sur l’essence et le diesel.     

 

Où en est la problématique de la tarification douanière à l’import des véhicules électrifiés ?

Il y a eu gain de cause grâce aux actions qui ont été menées par l’Association il y a plusieurs années. Aujourd’hui, sur les véhicules Full Hybride, Hybride rechargeable et l’électrique, les droits de douane ont été ramenés à 2,5%. Cette mesure douanière s’applique sur les VE en provenance des pays non-européens.

Concernant la TVA, nous continuons de nous mobiliser auprès de l’Etat.

Ce qu’il faut préciser c’est que le Maroc ne peut pas être détaché de ce qui se passe dans le monde. Actuellement, on est lié à des constructeurs mondiaux et les tendances envisagées par ces derniers affecteront le Maroc. Ce qui est déjà le cas. Le consommateur marocain commence à s’orienter vers l’électrique et l’hybride. La mouvance est là, mais le rythme reste long à cause d’un certain nombre de contraintes structurelles.


18/09/2025 18:05:00